Ernesto Grassi a été l'une des figures les plus importantes de la philosophie européenne. Peu connu en France, où deux seulement de ses ouvrages, Humanisme et marxisme et La Métaphore inouïe, ont été traduits, il jouissait d'un grand prestige en Italie, sa patrie, et surtout en Allemagne, où il passa la plus grande partie de son existence. Son œuvre est d'ailleurs, pour l'essentiel, écrite en allemand.
Né à Milan, en 1902, Grassi étudia la philosophie dans sa ville natale, puis à Aix-en-Provence,
avec Maurice Blondel. Une rencontre avec Husserl, à Fribourg-en-Brisgau, en 1924,
eut une influence déterminante sur sa carrière et son destin philosophique, en achevant
de le libérer de l'influence écrasante que le néo-hégélianisme de Croce et de Gentile exerçait
à cette époque sur la philosophie italienne. À Marbourg, il suivit l'enseignement de Heidegger,
qu'il accompagna en 1929 à Fribourg-en-Brisgau, et auprès de qui il resta près de dix ans en
qualité de lecteur, puis d'assistant, et enfin de « professeur honoraire ». La pensée de
Heidegger le marqua profondément, même s'il prit assez tôt ses distances avec son maître
pour des raisons tout à la fois humaines, politiques et philosophiques. En 1938, il fonda à
Berlin, avec Romano Guardini, l'institut Studia Humanitatis, consacré à la défense de
l'humanisme latin et italien, et qui prit, dans le contexte de l'époque, la signification d'une
résistance à l'idéologie germanique. Pendant la guerre, il se réfugia en Suisse, où il enseigna à
l'université de Zurich. Ensuite, pendant vingt-sept ans, il fut titulaire de la chaire d'histoire et de
philosophie de l'humanisme à l'université de Munich, tout en ayant d'importantes responsabilités
dans le domaine de l'édition (il dirigea chez Fink l'Humanistische Bibliothek, et chez Rowohlt
la Rowohltsdeutsche Enzyklopädie et les Rowohlt Klassiker). Jusqu'à l'extrême fin de sa vie, il
eut une activité intellectuelle intense, publiant à un âge avancé certains de ses textes majeurs.
Son œuvre, livres, articles, préfaces, conférences, est très abondante, et on se contentera de
citer quelques-uns des titres les plus significatifs : Macht des Bildes. Ohnmacht der rationalen
Sprache. Zur Rettung des Rhetorischen (Puissance de l'image. Impuissance du discours
rationnel. Pour sauver la rhétorique), 1re éd. 1970, 2e éd. 1979 ; Humanismus und Marxismus
(Humanisme et marxisme), 1973 ;
https://www.universalis.fr/encyclopedie/ernesto-grassi/